samedi 25 octobre 2014

L'avancement du projet Dewoitine 551 (Mis à jour le 04/ 10 / 2018)

Mieux vaut tard que jamais, dit-on.


J'avais reçu en début Octobre, par l'intermédiaire de l'Echarpe Blanche, la dernière livraison de l'excellent mensuel vidéo Tripale Magazine.

Mais ce numéro est d'autant plus passionnant qu'on y trouve un remarquable reportage sur l'association Réplic'Air et son dernier projet, la construction du chasseur oublié Dewoitine 551 (voir ce post sur le projet et cet autre post sur l'avion en Juin 1940).

Il est merveilleux de voir l'esprit de l'équipe, sa rigueur et sa passion.

Je suis très impatient mais aussi curieux (et peut-être aussi un peu angoissé) de savoir comment cette petite bête de très haute performance va voler.

J'imagine qu'elle sera sacrément nerveuse !


Mais pour ceux qui auront la difficile tâche de sa mise au point, j'imagine qu'une fois qu'elle sera devenue civilisée, ils éprouveront un immense plaisir à la faire voler.


Point de 2018 : Si le calendrier initial n'est pas tout à fait tenu, ce n'est que normal, tant il y a de données à maîtriser.

Le D 551 d'origine a été conçu il y a presque exactement 80 ans... 

Tout est à reconstruire, du moteur 12 Y au type de pilotage des pilotes de chasse de l'époque. 

Le passage dans la célèbre soufflerie verticale de Lille, évoqué le 27 Juin 2018 sur le site de Réplic'Air, est une excellente nouvelle quant au bon comportement de cet avion pendant une vrille.  


Sachant que le Dewoitine 520 se comportait très bien pendant les piqués à très grande vitesse et que la voilure du D 551 est d'une épaisseur relative significativement plus faible, il me paraît difficile d'imaginer que ce chasseur puisse éprouver les graves problèmes qu'éprouva le Hawker Typhoon, doté d'une vitesse aussi grande.

J'attends avec impatience de voir sortir l'avion et de constater que ce rêve était hautement raisonnable.


N'oubliez pas de cliquer sur le lien (en bout de la seconde phrase).

vendredi 3 octobre 2014

Reconnaissance maritime et lutte anti-sous-marine par hydravions embarqués dans la Marine Française : 1914 - 1940 (révu le 16 / 09 / 2023 ***)



{If you prefer to read this post in English, click here}



Les premiers hydravions de reconnaissance de la Marine Française en 1914 


(sources : Nieuport 1908-1950 de Rosenthal et alia, Docavia n°38 et aussi le très intéressant poste des choufs sur l'Aéronavale)

Un travail de reconnaissance remarquable fut réalisé, à partir du 5 Décembre 1914, par un petit détachement de marins avec une petite escadrille d'hydravions monoplans Nieuport.

Cette poignée d'appareils (de 5 à 10 suivant les auteurs) étaient "prêtés" à nos alliés Britanniques basés à Port Saïd, pour les aider à tenir solidement la voie éminemment stratégique du Canal de Suez (en particulier pour nos approvisionnements en pétrole et en ressources humaines)

Il est à noter que parmi les pilotes officiers de marine appartenant à cette petite phalange, MM Delage et de L'Escaille jouèrent ensuite un grand rôle dans la société des avions Nieuport, le premier au niveau de la conception des cellules, le second au niveau de l'administration.

Une voilure de 24.8 m² sustentait ces hydravions de 500 kg à vide et de 795 kg au décollage, leur conférant une charge alaire de 32 kg/m².




Hydravion Nieuport à Suez, 1914-1915 - le pilote était assis à l'arrière. L'aile médiane attachée en avant de l'observateur ne dégageait pas ses vues vers le bas et le gauchissement lourd ne favorisait pas l'inclinaison de l'appareil. 


Ces petits hydravions biplaces, motorisés par des moteurs rotatifs de 80 Cv, volaient - dit-on -  constamment à 100 km/h, parce que leurs moteurs fonctionnaient à un régime unique pendant plusieurs heures (5 heures pour le modèle le plus courant) .  

Vue la faible puissance, la charge et la traînée des flotteurs, une vitesse de croisière de 100 km/h n'était pas si médiocre que cela

Je me garderais donc bien de critiquer la notion de régime unique qui devait avoir été imposée pour protéger le potentiel du moteur.

Mais la fatigue du pilote devait être importante car que la montée en altitude, surtout en Egypte où les températures moyennes sont plus élevées qu'en Europe de 6 à 10°, donc avec un pouvoir ascensionnel très médiocre, ne pouvait être pratiquée qu'à très faible pente.

Le vol en piqué devait évidement être proscrit, donc toute descente impliquait des précautions, gaz réduits, pour garder le moteur dans ses limites. 


Comme ces hydravions ne disposaient pas d'ailerons pour virer, les virages étaient assurés par torsion des ailes... 
Leur maniabilité était donc très moyenne, d'autant plus que les flotteurs induisaient à la fois surpoids, ballants et résistances aérodynamiques parasites.

Il faut cependant ajouter qu'un de ces Nieuport incorporait des longerons de voilure en acier "souple". De loin le plus manœuvrant de tous, il resta malheureusement unique. Son autonomie maximale passait cependant de 5 à 4 heures.



Sur ce terrain lointain et difficile, ces appareils firent presque uniquement des reconnaissances terrestres.

Stratégiquement parlant, ces missions se révélèrent aussi importantes que celle que Louis Bréguet fit le 2 Septembre 1914, et qui décida de la Bataille de la Marne.

Nos hydravions sauvèrent ainsi le canal de Suez d'une mainmise Germano-Ottomane en repérant les colonnes ennemies qui s'en approchaient. 

Malgré leur aspect de grande fragilité, un seul de ces Nieuport fut perdu - en Syrie - pendant cette période. 

Ce travail de reconnaissance terrestre, pour fondamental qu'il ait été, ne concernait pas le cœur de métier des marins qui en font peu état.



La lutte anti-sous-marine


Pendant la Grande Guerre, la lutte contre les sous-marins fut le seul domaine où les marins Français acceptèrent d'employer des aéronefs pour effectuer de véritables reconnaissances maritimes. 

C'est qu'en ce début du XXème siècle, les tenants Français de l'orthodoxie étaient des gens conceptuellement prudents. 

Ils refusaient de miser essentiellement sur des matériels entièrement nouveaux, comme les torpilles, les sous-marins et les avions, très mal connus et effectivement peu fiables.

Disposer d'une force traditionnelle de cuirassés n'avait absolument rien d'anormal, bien au contraire, en ce début de XXème siècle.


Par contre, après la victoire, une fois connues à la fois l'incapacité des cuirassés à détruire leurs stricts homologues ennemis pendant la Bataille du Jutland, puis les expériences de Billy Mitchell en 1921 (montrant que les avions, eux, pouvaient couler les meilleurs cuirassés du moment) il en aurait dû, logiquement, en aller tout autrement.

Pendant la "Belle Epoque", alors que les armes nouvelles existaient déjà bel et bien, il paraît surprenant que la fiabilisation des avions et des sous-marins n'ait pas été vue comme une ardente obligation.

Certes, la France avait joué un rôle de pionnier entre 1890 et 1900 dans le domaine du sous-marin, en définissant les outils de son autonomie, de sa stabilité, en lui apportant aussi le périscope, donc tous les outils permettant d'en faire un efficace atout tactique.


Quelques mots sur les sous-marins Français de la Grande Guerre

Nous en avions même construit des séries relativement importantes puisque le Gustave Zédée - Q 092, entré en service en Octobre 1914 - fut le 92 ème construit pour la France depuis le fameux Gymnote (voir sur cet excellent site).

Malheureusement, les types de sous-marins  choisis, relativement petits, inconfortables et dotés d'une faible autonomie, tenaient encore trop de navires expérimentaux : Leurs équipements, en particulier, ne semblent pas avoir été d'une grande fiabilité (par ex. les périscopes du Turquoise n'étaient pas étanches à l'eau, ce qui causa sa perte aux Dardanelles !). De plus, leurs divers aménagements n'avaient été rationnellement pensés. 

En conséquence, leur temps de passage de la navigation en surface - sur moteurs thermiques - à la navigation en immersion - sur moteurs électriques - variait de 6 à 15 minutes, ce qui n'était absolument pas raisonnable, vu que le poste de surveillance de l'horizon était très bas et qu'ils naviguaient lentement en surface (10 kts au mieux).

Leurs superstructures étant à la fois trop basses (ce qui faisait entrer des paquets de mer à l'intérieur), compliquées et démesurément longues, développaient une forte traînée qui réduisaient considérablement leur vitesse maximale en immersion.

Cela réduisait également leur autonomie sous la mer, quoique les Pluviose et Brumaire aient eu, en plongée, une autonomie de 84 milles à 5 kts, bien supérieure à celle des grands sous-marins Allemands contemporains - 50 milles à 4 kts.

D'un autre côté, les profondeurs qu'ils pouvaient atteindre - 30 à 40 m - restaient bien modestes. 


N'était-il pas paradoxal que l'Allemagne, partie 10 années plus tard que notre pays dans cette course et qui s'était, surtout, construit une formidable force de dreadnoughts, ait pu disposer si vite de sous-marins considérablement plus fiables que les nôtres et aptes à s'immerger dans des temps inférieurs à la minute ?

Cela venait certainement du très faible niveau d’exigence - là, il ne s'agit pas de manque de compétence, car les coques des sous-marins Français étaient remarquables - des Ingénieurs Généraux de la Marine lorsqu'il s'agissait de ces "joujoux" qu'ils jugeaient a priori inutiles !!!


Dès le début de la Grande Guerre, nos amiraux, dont évidement aucun n'était sous-marinier, envoyèrent nos sous-marins à l'assaut des filets anti-sous-marins et des champs de mines qui leur étaient associés par les marines Germaniques et Turques.

Le but était d'attaquer les flottes ennemies dans leurs bases. Un tel choix a de quoi interpeller quelque peu !

En effet, lorsqu'un navire de surface armé d'artillerie attaque une flotte au mouillage, il prend les équipages adverses par surprise et peut porter des coups décisifs sans avoir à en subir en retour.

Telle fut la tactique victorieuse du Bailly de Suffren à La Praya, de Nelson à Aboukir, et même de Yamamoto à Pearl Harbor (où l'artillerie était remplacée par l'aéronavale Japonaise).

Par contre, un sous-marin, où qu'il soit et à quelque époque que ce soit, y compris en 1914, doit toujours disposer de la capacité de manœuvrer en immersion. 





Défenses Turques dans les Dardanelles - Les champs de mines à quelques centaines de mètres les uns des autres et les filets qui en défendent l'entrée obligent le forceur de barrage à passer près des berges, donc en visibilité directe des forts ennemis s'il est en surface.


La mission des filets anti-sous-marins comme des champs de mines linéaires était justement de partitionner l'espace sous-marin et de bloquer toute manœuvre pour ce type de navires. 

Les Italiens, eux, étaient conscients de cela. Courageux et très inventifs, ils décidèrent -  dans leurs attaques contre la flotte Autrichienne, de monter des attaques sophistiquées fondées sur des vedettes lance-torpilles qui passaient au-dessus des champs de mines et pouvaient se glisser aisément dans les zones de raccords entre les différents filets et la côte.



Les hydravions Français 


Pour lutter contre les U-Boote, nos amiraux n'aimaient vraiment pas les monoplans Nieuport dont la voilure, montée relativement haut sur le fuselage, bloquait en partie la vue de la surface maritime aux observateurs. 

Les bateaux-volants avaient donc toutes leurs faveurs : D'abord, ils se comportaient réellement comme des navires lorsqu'ils étaient sur l'eau (même s'ils y étaient un peu patauds), ensuite, l'observateur y prenait place dans un balcon bien à l'avant des ailes comme du pilote (!) et le moteur se trouvait derrière le pilote, entraînant une hélice propulsive.


D'un autre coté, pendant la Grande Guerre et même du côté Allemand, les sous-marins utilisaient des notions tactiques encore peu avancés. 

L'analyse des bruits n'était, semble-t-il, pas encore très répandue.


L'affût près des ports ennemis était donc un moyen simple d'attendre les victimes à venir. 

Encore fallait-il identifier ces futures victimes pour éviter de couler des navires neutres ou amis !

Le périscope était l'outil parfait pour cela.

Pour éviter d'être repéré lors de son emploi, il fallait naviguer à très faible vitesse, voire s'arrêter, et donc près de la surface (de 8 à 12 m à l'époque).

Lorsque l'eau était très peu agitée (Beaufort < 3), un sous-marin entièrement immergé était alors relativement facile à repérer comme la photographie ci-dessous le démontre.




Document personnel de l'auteur  -  Un sous-marin Français (probablement type Joessel, dont l'immersion normale était limitée à 35 m) en immersion périscopique vers 1925. La mer est calme.


Pour trouver sa proie, l'avion devait cependant être situé assez près de la verticale de sa proie et ne pas voler trop haut (de 300 à 500 m me paraît avoir été un maximum).

Ces conditions étaient peu fréquentes, sauf peut-être, en Méditerranée... 

{Pour mémoire, les sous-marins modernes vivent quasi exclusivement en plongée et à des profondeurs considérablement plus grandes, il est donc quasi impossible de les repérer visuellement de nos jours.}


Dans la Grande Guerre, les avions anti-sous-marins Français portaient des bombes trop légères et volaient trop lentement pour que des mises à mort soient avérées.

Cela ne signifie pas que nos avions aient été inutiles, au contraire, puisqu'il fut constaté que les sous-marins Allemands s'éloignaient le plus vite possible des zones patrouillées par nos marins volants, ce qui protégeait efficacement nos navires de surface.

Les U-Boote touchés pouvaient réparer les effets d'une ou deux attaques, guère plus. Comme, en plus, leurs proies - lorsque des canons y avaient été montés - essayait de les détruire, leur survie tenait dès lors à un fil.

{Notre Foucault - Q 070 - fut le premier sous-marin détruit après attaque aérienne, mais il avait subi également un grenadage qui l'avait amené à plonger à 75 m, près du double des 40 m autorisés.}

De plus, les moteurs aéronautiques étaient encore peu fiables et les émetteur radio quasi inexistants (ils ne furent pas généralisés avant 1918 - source : Avions n° 175article de Aimé Salles) : Il était donc très difficile de rameuter d'autres hydravions patrouillant à distance. 



Vers la reconnaissance maritime tactique ?


(sources sur les combats en Manche : un ensemble d'ouvrages remarquablement didactiques sur l'inlassable travail de tous nos marins de l'époque, rédigés par le commandant Paul Chack. 

Malheureusement, confronté à la tragédie de Mers El Kebir et, pour une fois, incapable de voir où était l'intérêt de la France, cet auteur développa une haine anti-Britannique inextinguible qui l'amena malheureusement à collaborer très activement avec les nazis, ce qui justifia son exécution en 1945.
)

Avant l'existence d'une aviation embarquée, la localisation de l'ennemi à partir d'un navire de surface, tels que les faits sont rapportés, était alors obtenue par la combinaison de sources aussi différentes que :
  • Des renseignements glanés par des espions, voire par de simples observateurs ; 
  • L'instinct de Chasse du commandant du navire ou de l'escadre (qui demande une grande expérience à la fois des conditions de mer, du trafic et de ce dont l'ennemi dispose à la fois comme navires et comme entraînement) ;
  • L'acuité visuelle des veilleurs postés dans les hauts de leurs vaisseaux pour rechercher à la jumelle les panaches de fumées noires typiques des chaudières (alors) à charbon, donc visibles à plus de 40 km dans les meilleures conditions - vent très faible ou venant de la poupe et faible température extérieure - voir photo ci-dessous.


Sur ce site -  Les fumées d'une flotte de cuirassés US telle que celle-ci (les mâts-cage culminaient à ~40 m au dessus du niveau de la mer) pouvaient être vue à près de 60 km (par temps calme)  mais, dès que le vent devenait plus rapide, il fallait venir à  moins de 20 km pour voir et, surtout, identifier directement les superstructures des navires dont les parties basses restaient quasi-invisibles derrière l'horizon terrestre.



Ce processus était donc, au niveau des méthodes employées, presque identique à celui que partageaient les marins de Surcouf plus d'un siècle plus tôt (la différence étant que les navires à voile ne produisaient pas de fumées et que ces voiles - en générale blanches - pouvaient facilement être confondues avec des nuages).

Bien sûr, la portée des canons avait été multipliée au moins par 5, la qualité des instruments optiques avaient aussi beaucoup progressé et, surtout, l'introduction d'une propulsion indépendante de la météorologie avait simplifié beaucoup de problèmes (quoiqu'elle en ait introduit pas mal de nouveaux, comme la nécessité absolue de ravitailler en combustible).




Document personnel de l'auteur - Ce que l'amiral commandant une flotte percevait entre les deux Guerres Mondiales. Des éléments hostiles pouvaient être cachés dans les zones d'absence totale de renseignements (brouillard de guerre). En ce début de 21ème siècle, les choses ont bien changé par la grâce des satellites de toutes sortes (images satellitaires, écoutes électroniques, Radar ou autres) et par l'augmentation des performances des capteurs à la disposition des flottes.


Un élément nouveau était apparu dans les vingt dernières années : Le renseignement radio (Télégraphie Sans Fil), qui exigeait un vaste réseau de bases navales et d'antennes. 

Ce type d'information était encore plus efficace s'il était associé aux informations transitant par les câbles transocéaniques ou à des structures équivalentes plus discrètes (ce qui est parfaitement expliqué dans l'article que le Fauteuil de Colbert a consacré aux combats de Coronel et des Falklands en 1914 tels qu'ils furent décrits dans un ouvrage remarquable de Claude Farrère et Paul Chack datant de 1925) .


Pendant la Grande Guerre, notre Marine se refusa à employer ses aéronefs de reconnaissance pour vérifier si des navires appartenant à l'ennemi passaient dans un rayon de 100 km autour de ses navires de combat.

Pourtant, ceci avait été pratiqué avec succès lors des manœuvres navales de 1913 en Méditerranée, interdisant le succès d'une escadre assaillante vers Toulon...





Collection personnelle de l'auteur - Hydravion FBA armé d'une mitrailleuse


Pour éclairer nos navires de guerre d'alors, les bateaux-volants comme ceux de type FBA (voir la photo ci-dessus, issue de la collection de mon grand-père), Tellier ou Donnet-Denhaut eussent pourtant été dans leur élément.

Mais il fallut beaucoup de temps pour que l'on comprenne comment on pouvait faire quitter le pont d'un navire par un hydravion (ou l'y faire revenir). 

Sans dispositif ou procédure adaptés à cet usage, aucun hydravion ne pouvait accompagner l'escadre.


La mise à la mer comme la récupération d'un hydravion au moyen d'une grue interdisait pratiquement de voler dès que le vent dépassait force 2 ! 

Naturellement, tout aéronef présente une prise au vent abondante, un encombrement important, une forme très complexe, une masse non négligeable en même temps qu'une densité très faible et une surface au vent considérable. 

Dès qu'un vent, même léger, se lève, il pousse l'avion avec force.

En conséquence, le contrôle de l'avion au bout d'une élingue portée par une grue devient vite difficile, voire un véritable cauchemar, sauf à disposer d'une procédure bien maîtrisée.

Ce problème dura jusqu'à l'introduction des catapultes à air comprimé.


La magnifique (?) Flotte de Georges Leygues


Ces choses avaient-elles progressé après la Grande Guerre ? 

Pas autant que ce que les hommes de l'aéronavale et les ingénieurs aéronautiques l'auraient permis, malheureusement.

Pourtant, aujourd'hui encore, la Marine de Georges Leygues reste admirée. 

On lit encore à  son sujet de nombreuses appréciations positives et aussi le rappel nostalgique du nombre de tonnes qu'elle pouvait compter par rapport celui des flottes des autres "Grandes Nations Maritimes".

Cette nostalgie n'est, en réalité, ni pertinente ni réaliste. 


{Problème de définition : Pour un citoyen, la Flotte Française ne peut, et n'a jamais pu, se réduire à un simple dépôt de quincaillerie aquatique dont la masse d'acier cumulée serait l'élément majeur. 

Une telle vision semble pourtant avoir été celle des décideurs de la Belle Epoque qui équipèrent les cuirassés de la classe Courbet de tourelles de 305 mm qui limitaient l'élévation des pièces à 12°, et donc leur portée à 13 500 m, en même temps que leurs télémètres avaient une base de seulement 2,74 m. 

Rien que cela pourrait expliquer pourquoi nos cuirassés furent incapables de couler les destroyers Autrichiens lors de notre victoire d'Antivari, le 16 Août 1914.

Il fallut attendre 1915 pour que des télémètres de 4.57 m les remplacent. 

A la fin de la Grande Guerre, on ouvrit l'élévation d'abord à 18° - la portée s'étendant enfin à 21 000 m - puis à 23° - la portée passant à 26 000 m - ceci s'accompagnant enfin du montage d'un télémètre de 8 m de base...                               

Les Dunkerque et les Richelieu, s'ils avaient des télémètres de 15 m de base et des canons portant loin, ignoraient encore le radar en Septembre 1939, alors que le paquebot Normandie en disposait dès 1936 !
                                                                                                                              
Une flotte doit être un ensemble de véhicules marins concentrant de très haute technologies régulièrement mises à jour et servis par des hommes à la compétence technique sans cesse renforcée et entraînés aux pires situations.

Elle peut alors défendre, partout où cela lui est possible, les intérêts de la Nation.}



De 1920 à 1939, le choix des navires à construire, celui des techniques anti-aériennes et même des techniques anti-sous-marines furent pour le moins contestables. 

Il est possible que l'amiral Darlan ait été responsable de ces choix, mais il eut été logique que d'autres personnes soient consultées.

On se doit de rendre hommage à l'Amiral Emile Guépratte, si brillant aux Dardannelles, qui, lui, avait parfaitement compris l'importance clé de l'Aéronavale.


Le seul domaine réussi fut le dessin des coques. L'expérience a montré que le choix de navires rapides était correct puisque la plupart d'entre eux ont survécu à la guerre.

Or, si notre flotte a écrasé la flotte Thaïlandaise à Koh-Chan en 1941 (avec bien peu de moyens mais en y utilisant, d'ailleurs, ses hydravions), presque partout ailleurs, elle a subi la loi des autres marines, celles qu'elle avait justement pour but de combattre.



En 1939, les officiers supérieurs de notre Marine, à l'exception d'une infime minorité, étaient restés sceptiques à propos de l'Aéronautique Navale.  

La surprise que la
isse transparaître à ses lecteurs le commandant Blanchard dans son excellente biographie du Commandant Jean L'Herminier (patron du célèbre sous-marin Casabianca en 1942-43), lorsqu'il constata, dans les années 30, l'osmose parfaite entre ce très grand sous-marinier et l'Aéronavale, est particulièrement démonstrative de sa conception originelle des choses : Un marin surdoué ne devait pas perdre son temps précieux avec ces trapanelles.


Pire encore, en 1946, malgré les éclatantes et redondantes démonstrations Japonaises et Américaines de la Seconde Guerre Mondiale, on refusa à l'Amiral Barjot (autre brillant sous-marinier) la conversion du Jean-Bart en porte-avions, ce qui eut été la seule option raisonnable pour cette grande coque qui ne servit jamais opérationnellement...


J'ai aussi évoqué la résistance des amiraux Français des années 30 à leur propre Aviation à propos de la chasse embarquée sur porte-avions, puis à propos du bombardement en piqué et enfin des avions torpilleurs Français ou même Britanniques.

Les techniques n'avaient pourtant jamais cessé d'évoluer très rapidement : Les moteurs étaient devenus fiables et les avions, considérablement plus évolués sur tous les plans, portaient beaucoup plus, plus loin et beaucoup plus vite.
Les catapultes étaient bien adaptées pour mettre en l'air des hydravions de 2 500 kg.

Dans la Marine Française, les premiers bâtiments de guerre à porter une catapulte furent les grands et très rapides croiseurs de 10 000 tonnes Duquesne et Tourville.

Malgré tout, la réussite de cet ensemble permit de généraliser rapidement la présence d'hydravions embarqués.



Un hydravion vraiment excellent, le Gourdou-Leseurre 810


(source : Les Ailes Françaises 3 - les hydravions à flotteurs, Bousquet, Fernandez & Boré, Artipresse)


En 1926, la maison Gourdou-Leseurre fit voler un hydravion monoplan à flotteurs et à aile basse qui démontrait un souci aérodynamique évident. 

{Parenthèse : Ce souci de profilage n'avait rien d'étonnant, vu que la même société avait fait volé en 1923 un remarquable avion de course parasol (le GL 30) destiné à remporter la coupe Beaumont.

Son moteur Jupiter avait ses cylindres carénés individuellement et son train d'atterrissage était rétractable.

Ce bolide avait pu démontrer, sur un seul tour du circuit fermé de 50 km, une vitesse moyenne de 360 km/h, permettant d'estimer sa vitesse maximale à environ 400 km/h.}

Sur le nouvel hydravion, le moteur était un Gnome et Rhône Jupiter de 380 Cv (issu d'une licence Bristol) et connu pour sa remarquable longévité.

L'aile rectangulaire en bois, au profil assez épais, s'insérait sur un fuselage à structure en tubes d'acier entoilé à l'arrière et habillé à l'avant par des tôles de duralumin. 

Les ailes épaisses étaient la mode du temps, parce qu'elles étaient plus légères pour une résistance donnée mais, si on poussait cette caractéristique à l’extrême - au delà de 20 %, elles ralentissaient les avions tout en leur conférant des caractéristiques de décrochage très brutales, donc difficiles à contrôler. 

Toute la proue de ce fuselage était soigneusement carénée et seuls les cylindres du moteur et leurs ailettes en sortaient.


Cet hydravion démontra d'excellentes qualités de vol et sa rapidité pendant un voyage aller et retour entre sa base d'essais et la ville de Copenhague (où se tenait un salon aéronautique) soit 4 500 km effectués en 25 h, soit à la moyenne de 180 km/h. 

Le seul incident des essais fut une panne de moteur qui obligea le pilote à poser son hydravion sur une mer de force 6. 

L'avion n'ayant subit aucun dégât, sa solidité - malgré des creux de 3 à 4 m - et sa rapidité - plus grande de 60 km/h que celle des hydravions auxquels il allait succéder - séduisirent les marins qui en commandèrent d'abord 6.


Ces avions de série avaient une voilure à structure métallique entoilée, disposaient de flotteurs allongés, portaient un troisième homme et étaient mus par un moteur de 420 Cv.
Ceci rajoutait du poids et n'améliorait en aucune manière l'aérodynamisme de l'avion.





Gourdou-Leseurre GL 811  -  Un hydravion fin, si on fait abstraction des mâts et de l'épaisseur relative de l'aile - Notez l'étonnante 3ème place derrière le mitrailleur, juste face au canon de sa mitrailleuse... 




Les ailes étaient presque rectangulaires, sauf à l'emplanture pour améliorer les vues de l'observateur, ce qui était aérodynamiquement très bizarre (sorte d'anti-raccord Karman) et, en vitesse de pointe, devait lui coûter au moins une bonne dizaine de kilomètres par heure.

L'empennage vertical, quasi-symétrique au dessus et en dessous du fuselage, lui assurait un excellent contrôle du vol à forte incidence par rapport au vent relatif, donc en évolution serrées comme à basse vitesse. 

La partie haute en fut cependant agrandie au détriment de la partie basse sur les dernières versions (GL 812 et GL 813), peut-être pour rectifier les effets de l'anti-Karman à moins que ce soit ceux du 3ème passager.


La masse de l'appareil, de 1 650 kg à vide, passait à 2 300 kg au décollage (et même 2 450 kg avec 150 kg de bombes). 

Avec 41 m² de surface pour 16 m d'envergure, la voilure avait un allongement de 6.24.

La charge alaire était donc vraiment très faible (52 kg/m² sans bombes), gage d'un maniabilité sans faille.


La vitesse de pointe était de l'ordre de 200 km (on ne peut que rêver à la vitesse qui eut été possible sans troisième passager, avec un raccord aile/fuselage plus normal et avec des ailes d'épaisseur un peu plus faible !). 

La vitesse de croisière étant de 155 km/h, l'autonomie (hors surcharge en carburant) atteignait 560 km.

Il montait à 3 000 m en 16 minutes et son plafond pratique était un peu inférieur à 6 000 m.

L'armement consistait en une mitrailleuse de capot Vickers, synchronisée avec le moteur et tirant vers l'avant et 2 machines semblables à la disposition du mitrailleur.

A partir de 1932, on décida d'adjoindre 150 kg de bombes en 1 ou 2 charges. 

Cela permettait d'attaquer en semi-piqué un sous-marin, un destroyer, voire, pourquoi pas, un croiseur léger.



Un hydravion plus rapide que ses homologues à roulettes

Pour fixer les idées, on peut comparer le Gourdou à son strict contemporain Levasseur PL 10, avion de embarqué sur le Béarn, également pour la reconnaissance.

Plus lourd de 400 kg, cet avion - quasiment de même charge alaire - montait à 2 000 m en 10', avait un plafond de 5 500 m et volait en pointe à 200 km/h.

Son autonomie ne dépassait pas 400 km.

Il disposait d'un moteur en ligne Hispano-Suiza de 600 Cv.

On pourrait croire que ces deux avions, destiné à réaliser les mêmes missions, étaient aérodynamiquement comparables : ce serait oublier que le GL 810 portait des flotteurs et disposait seulement de 420 Cv ! 
Monté avec un train à roues, il eut volé environ 30 km/h plus vite.

Cela signifie également que la flotte Française pouvait davantage compter sur ses hydravions de reconnaissance que sur les avions du Béarn pour découvrir un ennemi lointain !


Après la réussite des essais de catapultage, 24 avions Gourdou-Leseurre 810 Hy furent commandés à la fin 1929.


En Septembre 1931, 20 exemplaires supplémentaires furent commandés, avec des ailes repliables - désignés GL 811 - puis 27 nouveaux légèrement modifiés une année plus tard - désignés GL 812 - et enfin 15 GL 813 en 1933. 

Au total, cela représentait 86 avions, une production inhabituellement élevée à cette époque - et pour l'Aéronavale - qui confirmait la grande satisfaction de ses utilisateurs.


Demandé pour former les pilotes pour la Coupe Schneider


En 1928, le gouvernement avait décidé que des hydravions de course représenteraient la France à la Coupe Schneider, sans avoir saisi correctement les problèmes de délais que cela posait. 

Evidemment, il fallut commencer par former au pilotage d'hydravionles pilotes de l'escadrille de haute vitesse, tous pilotes de chasse excellents mais n'ayant aucune expérience en termes d'amerrissage. 

On leur avait fourni des bateaux-volants FBA aptes à voler, au plus, à 140 km/h pour s'entraîner. 

Ainsi que Jean Liron l'écrivait dans son livre sur les Avions Bernard (Docavia #31), le commandant de cette escadrille, le CC Amanrich, essaya d'obtenir au moins un GL 810 pour disposer d'un engin de configuration identique (hydravion à flotteurs en catamaran et à ailes basses) à celle de ses futures montures

Ses demandes réitérées n'aboutirent jamais, mais une telle insistance soulignait les très bonnes qualités de vol de cet hydravion.

Il paraît évident, de nos jours, qu'il eut même été aisé de transformer certains de ces triplaces en monoplaces, de caréner plus sérieusement leur moteur, d'en augmenter un peu la puissance et d'en réduire la surface alaire, pour réduire sa masse au décollage vers les 1600 kg et augmenter la charge alaire jusqu'aux alentours de 100 kg/m².

Ainsi on aurait rendu à peu de frais quelques uns de ces avions un peu plus proches des performances des avions de course (dont, par exemple, le Bernard HV 120, le seul à avoir pu voler vite à peu près à temps - 530 km/h - avait une charge alaire de 190 kg/m²). 

Ainsi modifié, un GL 810 de sport aurait pu voler considérablement plus vite que la version de série.

Ensuite, il eut été possible d'en extrapoler un honnête hydravion de chasse, un peu moins rapide que le projet fantasmatique que je viens d'extrapoler, mais bien plus que les Wibault à roulettes embarqués sur le Béarn (225 km/h). 

Plus tard, un moteur à compresseur lui aurait permis de friser les 300 km/h en altitude.  



Le GL 810 opérationnel, puis en guerre


Utilisé par la Marine depuis 1929, cet hydravion a bourlingué partout en se rendant véritablement indispensable.  

La Marine l'avait commandé par petite séries de 15 à 20 exemplaires, en exigeant chaque fois de profondes modifications de structure (passager supplémentaire, squelette métallique de la voilure, repliage des ailes, agrandissement de la dérive) :

Ces faibles cadences, associées aux modifications permanentes, signifiait que ces fabrications étaient encore fortement artisanales.

Evidemment, peu après la passation de ses commandes, la Marine se plaignit que les appareils commandés ne sortaient pas instantanément, ce qui montre à quel point les responsables de l'époque étaient totalement inconscients de la nature des processus industriels. 

Il est remarquable qu'il n'y ait eu à déplorer, au total, que 4 accidents mortels sur ces engins, un taux inférieur à 5%, particulièrement faible pour l'époque, en particulier d'agissant d'un avion amené réaliser à des vols militaires de nature complexe, avec une structure entoilée exposée à un milieu humide très favorable au développement des moisissures. 

Quelques esprits chagrins déplorèrent que cet hydravion ne résiste pas à l'engagement dissymétrique des flotteurs en cas d’amerrissage à vitesse excessive.

Voilà un genre de critique qu'il est difficile de comprendre : A grande vitesse, l'eau n'est jamais une surface soyeuse et sympathique. Si les flotteurs ne touchent pas la surface avec un bon angle de cabrage, l'appareil aura du mal à se freiner. 
Si l'avion vole un peu incliné sur son axe de roulis, l'un des flotteurs peut entrer trop profondément dans l'eau, ce qui va freiner violemment l'avion et lui faire réaliser un cheval de bois, voire le faire capoter. 

Ceci est forcément pire par gros temps.

Il s'agit donc plus d'un problème de pilotage que d'avion, sauf avec les bateaux-volants (hydravions à coque pour les traditionalistes) dont les petits ballonnets latéraux ne touchaient l'eau, en théorie, qu'à la fin du poser, mais dont il est rapporté, quand même, qu'il leur arrivaient d'être arrachés.



Vers la fin de 1936, les décideurs marins avaient validé l'achat de remplaçants des Gourdou-Leseurre en 1935, pensant sérieusement que ces hydravions devenus anciens étaient incapables de remplir les tâches d'hydravions embarqués.

La guerre déclarée, ils envoyèrent les Gourdou 812 / 813 remplir les tâches obscures de la surveillance anti-sous-marine le long des côtes Françaises (mais aussi réaliser des liaisons).

Cependant, ces petits hydravions étaient des guerriers-nés et, moins d'une semaine après la déclaration de guerre à l'Allemagne, un GL 813 Hy de la base de Saint Mandrier (3S1) fut amener à bombarder en semi-piqué un sous-marin en plongée sans que les résultats de son attaque aient été connus, mais ses 2 sectionnaires avaient lancé leurs bombes sur une tâche d'huile apparue peu après.

En Mai 1940, 3 unités volaient encore opérationnellement sur cet hydravion. Comme les autres unités aériennes Françaises, elles firent retraite face à la Wehrmacht.

Dans les tous derniers jours de la Bataille de France, les Gourdou-Leseurre de la 1S2 quittèrent Lorient pour Hourtin en totale surcharge, chacun emmenant au moins 4 hommes en plus des bagages et de l'équipement. 

C'était une remarquable performance pour des avions qui avaient déjà au minimum 6 ans de service intensif.

Malheureusement, tous furent fait prisonniers à leur arrivée à Hourtin,  parce que cette évacuation avait été bien trop tardive (Source : W. Green, Floatplanes of WW II, #6).

Les deux autres unités qui s'étaient repliées vers la Méditerranée ne connurent pas ce funeste destin.

Le dernier vol d'un Gourdou-Leseurre 812 fut réalisé à Fort de France en 1944, quinze ans après sa réception. 



Remplacer les Gourdou-Leseurre 812 par des Lioré-Olivier H 43 ? 

(Source: l’Hydravion de Surveillance LéO H 43, Gérard Bousquet, Air Magazine, n°25, Avril 205)

Au moment où les Gourdou-Leseurre GL 810 entraient en service, la Royale décida de se lancer dans la conception de ses successeurs, ce qui était une pratique intelligente. 

L'accent fut mis sur l'autonomie qui devait passer de 550 km à 800 km. 

Par contre, la vitesse de pointe comme celle de croisière ne changeaient pas par rapport aux GL 812, ce qui ne laisse pas d'étonner.

Malheureusement, cet hydravion LéO H 43 était vraiment né sous de mauvais auspices. 

Les comités lui avaient imposé un volumineux balcon ventral, dont les vitres devaient récolter d'énormes quantités d'embruns au décollage (ce type de gibbosité fut aussi imposée - quoique mieux réalisée - sur le Latécoère 298 E de reconnaissance qui déçut tellement ses pilotes qu'il fut rapidement abandonné). 

Bien sûr, il fallait aussi que le pilote soit assis derrière l'observateur lorsque celui-ci n'était pas dans le balcon inférieur. Cela exigeait que le poste de pilotage soit rehaussé.

En conséquence, les ingénieurs de LéO réalisèrent un fuselage trapu, ventru et bossu qui prolongeait un énorme moteur Hispano 9V de 720 Cv, celui-là même de l'hydravion de chasse Loire 210, moteur qui n'aurait jamais dû être monté sur un monomoteur.

Jacques Lecarme critiquait vertement, et à juste raison, les commissions qui posaient des exigences contradictoires. L'histoire de cet avion illustre son propos.



LéO H 43 prototype



Bien évidemment, on ne lésina pas sur le nombre d'entretoises et de mâts de soutènement !

La photo du prototype montrent que l'équipage était installé sous une verrière unique qui protégeait le pilote puis l'officier observateur et, enfin, le mitrailleur.

Lorsque l'observateur voulait une vision claire de la surface de la mer, une fois sur la zone de recherche, il descendait dans sa gondole ventrale largement vitrée...

Le mitrailleur faisait aussi office de radio et, pour cela, il devait descendre à l'étage du dessous et tourner le dos à d'éventuels chasseurs...


Cela signifie que cet avion disposait de 5 places pour 3 membres d'équipage.

Comme chaque place augmentait le volume de l'avion, sa masse à vide augmentait aussi d'environ 200 kg par place.

Certes, le prototype, avec ses 1 760 kg de masse à vide et ses 3 000 kg de masse au décollage était animé par un Hispano-Suiza 9Va de 575 Cv "seulement" affublé d'un anneau Townend, avait été crédité d'une vitesse de 237 km/h fin 1934, une amélioration de 20 % par rapport au GL 810.

"Curieusement" l'avion de série ne dépassa pas 222 km/h au niveau de la mer.
La vitesse tombait à 204 km/h à 3 000 m, altitude atteinte en 19 minutes (!).

De 11 m de long, il avait une voilure de 16 m d'envergure et 36 m² de surface.

Pourtant, il disposait d'un moteur 9 Vb de 720 Cv (145 Cv de plus) théoriquement mieux caréné par un capot NACA, 

Bien pire encore, ses qualités de vol étaient si médiocres qu'elles retardèrent son entrée en service de 4 années au moins (mise en formation en Février 1940) ! 





LéO H 43 de série :  Gros moteur, gros fuselage biscornu, courte dérive dans un flux d'air fortement perturbé : Tout ce qu'il fallait pour voler mal et lentement.


Il faut dire que, comme l'Aérodynamique n'avait pas été respectée, elle se vengea cruellement. 

Ainsi, on avait refusé la verrière commune à tout l'équipage, pour préférer des postes séparés (voir photo ci-dessus du LéO H 43  de série).

On retrouve l'étonnante préoccupation du LV Hamelet que je rapporte en substance : 
(Air Magazine n° 25, article de Gérard Bousquet sur le LéO H 43) : 

"(..) sur les appareils de surveillance, l'observateur est un officier alors que le pilote est le plus souvent un débutant qui a son entraînement à faire (il n'est donc pas apte à identifier un navire - NdR)

L'observateur doit donc être à l'avant. Il commande par signe au pilote placé derrière lui. 


En ce qui concerne la défense arrière qui peut être jugée insuffisante, le radio, occupé à la TSF, pouvant être amené à manquer d'attention pour la surveillance, celle-ci, dans une certaine mesure, pourra être assumée par le pilote (cas de l'appareil volant en rond au-dessus d'une zone à surveiller). 


Au cas où il y aurait besoin d'une défense arrière totale, l'observateur disposerait d'un manipulateur avec un poste réglé. 


Le radio, vérifiant seulement de temps à autre le bon fonctionnement du poste. 


Ou encore, en n'emportant pas de bombes, l'équipage pourrait être de quatre hommes."



Ce commentaire, publié par Gérard Bousquet dans son article précité, montre le gros problème de nos décideurs marins à cette époque.

Pensant qu'un marin vivait sur un cuirassé, véhicule où la place ne manquait jamais, ils en avaient retranscrit l'ensemble de la procédure de commande. 

Ils voulaient donc plus de monde à bord alors que les avions ont pour obligation première d'être fins et rapides.

En fait, ce que le capitaine Hamelet avait démontré, c'était que la fameuse gondole ne servait à rien, que le mitrailleur devait disposer d'un poste radio préréglé, et que le pilote devait être officier de marine.

Cette philosophie du LV Hamelet me paraît exprimer un avis de caste.

Même si elle semble avoir été largement partagée à l'époque, elle était totalement erronée :
  • Le pilote tient toujours dans ses mains la sécurité de l'aéronef et de tous ses occupants.
  • Il doit, de ce fait, avoir une vision parfaite de l'espace qui environne son avion. 
  • Lui seul dispose des informations lui permettant de placer son avion en bonne position car il est seul capable d'anticiper les futurs paramètres de vol.
  • Un pilote militaire doit, en plus, soustraire son avion aux dangers liés aux conditions de vol en ambiance hostile, voire être aussi apte à détruire un avion ennemi.
  • Les ordres de l'officier donnés par gestes me laissent rêveur. 
  • La vision de la défense arrière par le pilote en plein virage a de quoi surprendre et l'image du radio passant sa vie à tapoter son manipulateur ou à régler ses fréquences ne donne pas une idée flatteuse de la modernité des matériels de transmission alors en usage dans l'Aéronavale.
  • La suggestion d'un 4ème homme montre que cet officier, tout ingénieur qu'il ait été, n'avait pas réfléchi en fonction du vecteur : Plus lourd que l'air, oui, mais pas trop quand même !
Qu'aurait pensé le LV Hamelet d'un Etendard IV P ?

On peut aussi rappeler que tous les pilotes savent voir en un centième de seconde ce que d'autres n'intègrent que bien plus lentement : C'est normal, puisque c'est la condition de leur survie. 

{Une jolie description de ce phénomène, mais dans le domaine ultra-terrestre des rallyes automobiles, fut donnée dans les années 70 par JF Jacob dans son excellent livre "Le Coéquipier".

Il s'y étonnait que son pilote, Jean Vinatier, alors qu'il courrait la Coupe des Alpes sur une Alpine-Renault A 110, soit capable de lui donner une interprétation parfaite d'un accident qui venait de se produire et que lui même avait à peine détecté.


La masse à vide du LéO H 43 de série avait bondi de 700 kg et sa masse au décollage de 400 kg.

L'appareil était tout le temps en panne, soit parce que le carburant "refusait" d'arriver au moteur, soit que les tôles de duralumin se déchiraient pendant le tir - d'exercice - de l'unique mitrailleuse d'aile (!).

On s'aperçut aussi que sa masse excédait les capacités des catapultes et on relégua ce vilain canard aux escadrilles de surveillance côtière, donc à des missions anti-sous-marines, et encore, dans des zones de petites dimensions.

Les LéO H 43 posèrent sans arrêt des problèmes et furent remplacés opérationnellement ... par des Gourdou-Leseurre 812, qui, eux, volaient toujours très bien...



Le Loire 130


Les marins optèrent finalement pour le Loire 130, plus lourd, théoriquement moins rapide et portant moins de bombe, mais qui pouvait transporter 4 passagers et qui avait été conçu de manière saine. 

C'était un bateau-volant dont les formes anguleuses traduisait une certaine difficulté à produire des structures arrondies. 

La voilure de 16 m d'envergure avait une surface de 40 m², donc un allongement équivalent à celui du Gourdou GL 812, mais elle bénéficiait de saumons d'aile arrondis.

Le moteur Hispano-Suiza 12 X de 690 Cv était monté en pousseur au dessus de l'aile haute et juste derrière le pilote.

Une telle disposition structurale, en multipliant les mâts (17 !), ne favorisait pas ni la finesse ni le refroidissement, ce qui amena, évidemment, à augmenter la surface de l'entrée d'air sans trop se préoccuper de la voie d'évacuation de l'air chaud. 

La masse de 2 050 kg à vide et de 3 300 kg au décollage, pouvait s'augmenter des 150 kg de bombes prévus.

En conséquence, la vitesse de pointe ne dépassait pas les 225 km/h et le plafond pratique atteignait 6 000 m.

Le rayon d'action publié varie de 1 100 à 1 220 km à 150 km/h (presque la même vitesse de croisière que celle du Gourdou 812).

Cet hydravion monoplan était donc tout à fait comparable au biplan Supermarine Walrus de la Fleet Air Arm.

Par contre, au même moment, les Japonais employaient un hydravion biplace, le Nakajima E8N, avec une vitesse de pointe de 300 km/h, une vitesse de croisière de 185 km/h, un plafond supérieur de 1 000 m et apte à monter à 3 000 m en 6' 30".






Loire 130 sur le site de Mer et Marine, dans la section Aéronautique Navale - On distingue, à l'avant de l'appareil, le poste d'observation en porte à faux.


Initialement, les critiques pleuvaient sur la réalisation du Loire 130, mais, après une mise au point minutieuse, l'engin se révéla sûr et facile d'emploi.

Il en fut commandé 150 exemplaires dont 124 furent construits.

Il entra en service en 1937.

Pouvant emmener plusieurs passagers (évidemment sans bombes à bord), il aurait donc été parfaitement adapté pour les missions de récupérations de pilotes naufragés (SAR).


J'ai déjà dit que les commandants de navires étaient très réticents à récupérer les hydravions avec les tapis crantés prévus !

Leurs confrères étrangers qui, eux, ne disposaient pourtant pas de ce luxe, mettaient en panne et récupéraient leurs hydravions dont ils connaissaient l'utilité vitale.

Il est vrai que les destroyers, dans ces marines, ne rêvaient pas aux combats d'artillerie contre des croiseurs, mais, plus utilement, ils chassaient les sous-marins pour éviter que ceux-ci ne coulent leurs croiseurs...

La seule mission où le Loire 130 se révéla être tout à fait efficace, dans les limites de sa faible vitesse, fut la lutte anti-sous-marine et Marcel Bougaran nous a donné, dans Icare, une description saisissante de cette action en Juin 1940, lorsque plusieurs de ces Loire 130 sauvèrent un de nos croiseurs de 7 600 t d'un torpillage tenté par le sous-marin Italien Dandolo.

Les derniers exemplaires survivant au conflit mondial  se révélèrent aussi très utiles pendant la Guerre d'Indochine.



Un hydravion de formule comparable fut commandé en 1939 : Le Bréguet 790 Nautilus

La qualité de son étude aérodynamique lui permit de voler, avec le même moteur Hispano 12 X, à 310 km/h, donc 45 % plus vite pour une masse plus élevée d'une demi-tonne (2 700 kg à vide et de 3 600 kg au décollage).  

Des critiques se sont abattues sur cet avion, bien après, à propos de sa faible hauteur au-dessus de l'eau. 

C'était juste oublier que cet hydravion partait par catapultage !



Bréguet 790 - des lignes fluides, 18 % de surface alaire en moins, un refroidissement moteur bien pensé et tellement moins de mâts ==>  Gain de vitesse de 90 km/h !





Les derniers descendants des GL 812 / 812


Lorsque certains marins eurent découvert, grâce aux GL 810, l'intérêt des reconnaissances aériennes pour n'importe quelle flotte de combat, ils se dirent que des croiseurs légers ou des ports coloniaux lointains auraient avantage à disposer d'engin du même genre. 

Un programme fut lancé dans ce but au début du Printemps 1930. 

Le vainqueur du concours fut le Gourdou-Leseurre 830, qui était une réduction affinée du GL 813, portant un moteur de 350 Cv qui lui assurait une vitesse de l'ordre de 240 km/h.

Très curieusement, les marins demandèrent que cet avion soit moins puissant, ce qui étonne lorsque l'on voit l'étendue des zones tropicales devant être couvertes. 

Le GL 831 de 250 Cv leur paru encore trop fougueux et ils obtinrent finalement le GL 832 de 230 Cv, qui volait juste à 200 km/h, comme son "grand-père".


(Parenthèse : Un autre avion, le second du concours, fut commandé peu après pour effectuer exactement la même tâche, le bateau-volant Potez 452. 

Sa mise au point fut plus longue, vu que sa coque, un peu trop marine, eut parfaitement convenu à un sous-marin, comme Henri Potez le raconta avec humour en 1961 à Aviation Magazine ! 

Il est tout de même surprenant que cet avion ait eu le droit de conserver le moteur de 350 Cv qui avait été refusé au Gourdou.




GL 832 - Une ligne très fine pour la période considérée (1930) et un hydravion de format réduit.


Tous les GL 832 survivants de ce type étaient encore en activité en 1941.


Lorsque la technologie se mit à évoluer, les marins demandèrent un avion plus performant que le Gourdou-Leseurre 812 / 813 pour emmener un équipage plus important.

La compagnie Gourdou-Leseurre présenta le GL 820, un quadriplace doté d'une capacité de bombardement de 300 kg, disposant enfin d'un capot NACA (encore très basique) et d'une autonomie de 1 000 km.

L'engin avait une masse à vide de 1 950 kg et en charge de 3 200 kg. Avec une hélice bipale à pas fixe, l'appareil volait à 215 km/h avec un moteur Hispano 9 V de 720 Cv.

Les performances déçurent.

Le dernier prototype de la lignée fut le GL 821-02.

Le fuselage était profondément transformé avec une verrière fermée très complexe comportant l'observateur à l'avant, le pilote derrière lui et le mitrailleur dans une tourelle arrière, préfigurant celle du Defiant Britannique.

Le moteur Gnome-Rhône 9 K de 750 Cv était un peu plus puissant et entraînait une hélice tripale certainement à pas variable.

Ainsi équipé, il passait les 235 km/h, mais c'était 2 ans trop tard. On peut s'étonner de la forêt de mâts liant les flotteurs aux ailes et au fuselage comme de l'hélice  qui ne semble pas être à pas variable.




Un porte-avions coulé : Le commandant en question 



Dans cet article écrit à l’Été 2012, je critiquais la faible compétence des dirigeants Alliés au début de la Seconde Guerre Mondiale. 

Je vais donc illustrer mon propos par une énorme défaite Britannique face à la Kriegsmarine.

Elle illustre à quel point la Fleet Air Arm souffrait, alors, d'un problème de commandement qui alla jusqu'à se traduire par la perte d'un porte-avions, le Glorious, de 2 destroyers et de lourdes pertes humaines (plus de 1 500 morts)


Le commandant du Glorious, le capitaine D'Oyly-Hughes, était l'ancien second du sous-marin E 11 commandé par le célèbre CC Martin Nasmith lors de son raid réussi en mer de Marmara en 1915. 

Lui-même s'y était montré en particulier un commando très efficace (agissant exactement à la James Bond). 

L'histoire ne dit pas par quel mécanisme ce sous-marinier avait pu obtenir le commandement d'un puissant porte-avion.

Il est facile de voir qu'il avait été abondamment décoré pour ses actions en Turquie, puis que le commandement de nombreux bateaux de types très différents lui avait été confié : Il semble évident que les Grands Décideurs de la Royal Navy voulaient en faire très rapidement un amiral.


On sait aussi qu'il avait obtenu un brevet de pilote. Pour autant, il n'est nulle part question de sa participation à des opérations aéronavales en tant que pilote.


Le 8 Juin 1940, il ramenait au pays 20 chasseurs de l'expédition de Norvège et n'était escorté que de deux destroyers (!). 

La mer était calme, le vent un peu supérieur à 6 kts et la visibilité était parfaite (au moins 50 kilomètres, on va le voir).

Aucun avion n'était rangé sur le pont d'envol, et, plus grave, aucun n'était en l'air pour surveiller quoi que ce soit.

La vitesse de croisière du navire avait été ramenée de 22 kts à 17 kts, ce qui lui assurait une autonomie de l'ordre de 6 000 milles nautiques, donc une marge énorme permettant d'augmenter très sensiblement son allure. En effet, il avait moins de 1 000  nautiques à parcourir.

Mais, j'insiste, il naviguait sans avoir mis le moindre avion en l'air, ce qui, pour un commandant de porte-avion en opération de guerre, signifie une incompétence... Himalayenne

Certes, il ne disposait que de 5 avions torpilleurs Swordfish, mais il disposait aussi de 10 chasseurs Sea Gladiator très manoeuvrants qui pouvaient assurer, à tour de rôle, une patrouille de reconnaissance, donc trouver (puis éventuellement perturber, en tirant sur les télémètres) les éventuels navires de lignes Allemands tout en donnant le temps aux avions torpilleurs de couler au moins l'un d'entre eux avant de réarmer et de recommencer.
Il ramenait aussi 10 Hurricane.

Les croiseurs de bataille Allemands Scharnhort et Gneisenau détectèrent à vue (1546) la fumée du Glorious à 50 km de distance. Ils passèrent aussitôt leur vitesse de 22 kts à 30 kts.

Les Allemands furent détecté, mais non identifiés (1600).





Option non choisie par le commandant du Glorious : L'une des formations est constituée de 4 torpilleurs Swordfish, l'autre de 4 chasseurs Sea Gladiator, chargés de leurrer la Flak 


Le Glorious, qui ne se doutait de rien et n'avait même pas un guetteur dans son nid de pie, n'avait ni accéléré son allure ni mis ses avions en l'air. 

De plus, il gardait une route qui ne le ramenait pas directement là où il devait aller

Les deux destroyers Ardent et Acasta créèrent un rideau de fumée puis se sacrifièrent héroïquement, mais n'attaquèrent pas simultanément, ce qui, tactiquement, n'était pas très efficace.

Leur sacrifice fut vain, même si le Scharnhorst fut endommagé sérieusement par une des torpilles lancées par l'Acasta

Le Scharnhorst ouvrit le feu à 26 500 m (1632). Un des 9 obus de sa troisième salve fit but 6 minutes plus tard. Le Gneisenau  fit de même.

Aucun des deux navires Allemands ne daigna sauver les marins tombés à l'eau. Honte à eux !

Donc le Glorious fut coulé par les croiseurs de bataille Allemands Scharnhorst - qui établit à cet occasion le record de portée d'un tir au but à une distance de 26 000 m à 24 000 m - et Gneisenau en début d'après-midi, le 8 Juin 1940, à l'issu d'un court combat (voir cette excellente source). 


Les fautes qui avaient conduit au naufrage de porte-avions Courageous, le 17 Septembre 1939, n'avaient vraiment 
pas été aussi graves, loin de là. 

Ce naufrage avait surtout résulté d'un mauvais timing. 

Les deux destroyers de son escorte s'étaient simultanément précipités au secours d'un navire marchant. Logiquement, un seul aurait suffit

Les avions étant tous rentrés se ravitailler en même temps, il n'en restait aucun en l'air, il n'y avait donc plus rien pour protéger le porte-avion.

Le commandant du porte-avion aurait dû, à mon avis, avoir plus d'autorité sur ses hommes.

Cette déplorable suite de décisions individuelles et ce manque total de compréhension des priorités entraîna la mort de plus de 500 marins.


Comme souvent avec les Britanniques, la leçon finit par être comprise, le commandement fut changé avant la fin Juin 1940 et, la qualité de l'entraînement aidant, la Fleet Air Arm redevint parfaitement efficace, d'abord au détriment de son alliée Française, comme elle le démontra, hélas, à Mers el Kébir, puis, de manière bien plus brillante, à Tarente, au détriment de son ennemie Italienne, la Regia Marina dont elle coula trois cuirassés. 

Mais, je l'ai dit ailleurs, cette maladie de la sous-estimation du rôle des avions dans les opérations navales continua lors de la destruction des cuirassés Prince of Wales et Repulse en Décembre 1941.



Conclusion


Une des caractéristiques des "élites" Françaises, pendant beaucoup de conflits perdus, a résidé dans leur certitude absolue que leurs "dons militaires exceptionnels" leur permettrait de tout gagner.

La simple lecture des livres d'histoires ou des témoignages d'acteurs historiques démontre que, chaque fois, leur certitude était totalement infondée. 

Exemple lointain, pendant la Guerre de Cent Ans, les nobles, certes parfaitement entraînés aux combats individuels à l'épée ou à la lance, avaient la certitude de pouvoir tout culbuter sur leur passage.

Dans le même temps, les enseignements d'Alexandre le Grand et de Jules César avaient été entièrement oubliés : 
  • les capacités réelles de la masse des combattants n'étaient pas prise en compte (de l'entraînement à l'armement en passant par le moral),
  • Les éclaireurs n'étaient pas écoutés, 
  • le terrain n'était pas analysé,
  • Les grands chefs partaient à la bataille juste pour y aller (voire pour montrer qu'ils ignoraient la peur).
Parfois, la supériorité numérique aidant, cela pouvait marcher, malgré tout (mais au prix de pertes pharamineuses).

Dans les autres cas, ce furent les catastrophiques défaites de Crécy et d'Azincourt. 

Ce qui construisit ces dernières, ce fut la cavalerie (arme décisive lorsqu'elle était bien employée), qui, en totale ignorance de la configuration des lieux, partait au grand galop soit pour s'effondrer sur les défenses disposées par l'ennemi soit pour s'en aller là où ses charges ne pouvaient pas se déployer et où elle recevait des dizaines de milliers de lourdes flèches qui tuaient ses chevaux. 

Elle était même allée jusqu'à piétiner l'infanterie, pourtant bien plus adaptée au combat tous-terrains.